vendredi 17 décembre 2010

Numéro de Décembre 2010

Tragédie WikiLeaks. Des milliers de responsables prennent feu et fuient la lumière du jour.
WikiLeaks emmerde le monde
Comme chacun sait, une organisation opaque qui ose protéger ses sources des intentions bienveillantes gouvernementales, WikiLeaks, a dévoilé des centaines de cables diplomatiques, parmi les 250 000 qu'elle possède, laissant aux internautes la liberté de télécharger et lire ces documents, et s'associant avec des journaux importants pour accomplir un effet maximum.
Une partie des médias français s'est indignée de cette transparence totalitaire, de ce vol d'informations 'secrètes'. Et c'est bien vrai. Est-ce que nous avons oublié l'Allemagne Nazie, et le totalitarisme? Pas de vie privée, n'importe qui pouvait être pourchassé, comme les Juifs le furent.
Et bien, les gouvernements sont les Juifs de notre époque, et ils ont simplement peur que le peuple les pourchasse avec des lois tyranniques comme celles qui interdisent le vol des informations de cartes bancaires, la vente de prisonniers de guerre de Guantanamo, ou des attaques meurtrières sur un village au Yémèn où les victimes sont toutes des civils. Des révélations de WikiLeaks dont nous nous félicitons que nombre de médias français ont eu la lâcheté de ne pas discuter, avec une soumission qui ferait honneur à l'esprit collaboratoire.
Comment voulez-vous que des criminels aient des discussions ouvertes entre eux, sur les magouilles qu'ils planifient dans le dos de leurs peuples, si les gens peuvent simplement écouter ce qu'ils se disent?!
C'est tout simplement infaisable! Nous devons restaurer l'opacité et l'irresponsabilité dans la gouvernance, pour que les états du monde entier puissent faire leurs saloperies en toute tranquillité, et raconter un joli conte de fées au reste du monde.
Nous devons rester ignorants des activités du gouvernement et faire confiance aux autorités qui ne veulent que notre bien. C'est comme cela que la liberté sera sauvegardée, avec une citoyenneté ignorante et aveugle, et un pouvoir sans limite qui veille sur tous. Tous avec Big Brother!

Des lois contre les droits

Deux projets de lois sont actuellement en discussion au parlement, une quatrième loi sur l'immigration, et une deuxième « loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure », dite LOPPSI 2.
Le projet de loi sur l'immigration prévoit notamment de donner plus de pouvoir à l'administration pour expulser, y compris de manière illégale, moins de pouvoir de contrôle pour le juge, et moins de possibilités de recours pour les personnes de nationalité étrangère.
Ainsi, l'administration pourra garder plus longtemps en centre de rétention les étrangers qu'elle souhaite expulser, le juge ne pourra contrôler que plus tard la légalité du placement en rétention (une partie des personnes auront déjà été expulsées lorsque le juge interviendra), et les pouvoirs du juge seront limités (il pourra annuler le placement en rétention seulement s'il est « gravement illégal », pas s'il est un peu illégal ; l'administration a donc le droit de violer la loi, si elle le fait seulement un peu).
Les zones d'attente existent dans les ports et les aéroports. Ce sont des bouts de territoire français qui sont considérés à l'extérieur de la frontière, cette invention juridique permettant de refouler plus facilement des étrangers, parfois même s'ils ont des visas en leur laissant peu de possibilités de recours. Le projet de loi prévoit que les préfets pourront créer des zones d'attente partout où sont trouvés des étrangers en situation irrégulière.
Le projet de loi prévoit aussi d'étendre les possibilités de perdre la nationalité française, de rendre quasi impossible l'obtention d'un visa pour raisons médicales, une interdiction de séjour pourra être prononcée contre les étrangers, qui pourra aussi bien concerner des gens habitant en France depuis des années, ou des étrangers mariés à des français.
Le projet LOPPSI 2 porte sur de nouvelles mesures pour le fichage des citoyens, la vidéosurveillance, le filtrage internet, pour le contrôle des e-mails et des ordinateurs, l'aggravation des peines de prison (peines minimales), des possibilités de mesures de surveillance après la sortie de prison, des mesures de couvre-feu applicables aux mineurs, le renforcement des pouvoirs des polices municipales, la création d'une « réserve civile de la police » et d'un « service volontaire citoyen » - sans qu'on sache vraiment à quoi vont servir ces nouveaux auxiliaires de police.
Et bien sûr quelques mesures visant spécifiquement les pauvres : la vente à la sauvette devient un délit passible de 6 mois de prison et 3750 € d'amende, et le préfet pourra décider l'expulsion sans jugement des occupants illicites d'un terrain (sont visés aussi bien les SDF qui vivent dans des tentes ou des cabanes, les migrants qui habitent des cabanes, les campements de Roms, les gens qui choisissent de vivre en yourte, etc.)
Bonnes fêtes de fin d'année.

Plus d'informations sur le projet de loi sur l'immigration:
www.gisti.org/IMG/pdf/hc_analyse-pjl-besson-20100330.pdf
www.lacimade.org/assets/0000/2014/analyse-pjl-besson-.pdf
www.syndicat-magistrature.org/analyse-critique-du-projet-de-loi.html
Pétition contre le projet de loi sur l'immigration:
http://www.petitionenligne.fr/petition/exigeons-le-retrait-de-la-loi-besson-/381

"Je nourris un pauvre et l'on me dit que je suis un saint. Je demande pourquoi le pauvre n'a pas de quoi se nourrir et l'on me traite de communiste". - Dom Helder

Rébellions et évasions

Les détenus des centres de rétention de Vincennes et Mesnil Amelot réclament le droit de vivre et d'être en France.
Les centres de rétention administrative, CRA, sont des prisons qui n'en portent pas le nom.
Un étranger en manque de papiers peut s'y retrouver directement après une garde à vue sans voir un juge des Libertés qui pourrait contester la légalité de son arrestation. Des mesures d'expulsion sont parfois prises sans que les détenus puissent bénéficier des recours légaux auxquels ils ont droit.
Le gouvernement accélère les procédures au mépris des droits juridiques pour réaliser son quota de 30 000 expulsions pour 2010.
Les drames humains se multiplient avec des expulsions de personnes ayant des attaches de longues dates, leur famille, sur le sol français, comme Najlaé, jeune fille de 19 ans renvoyée au Maroc après s'être présentée au commissariat pour déposer plainte contre des violences de la part de son frère.
Les centres de rétention sont remplis au delà de leur capacité grâce à l'acharnement gouvernemental et policier contre les sans papiers.
Au CRA de Vincennes les détenus ont commencé à se rebeller. Ils dénoncent les maltraitances qu'ils subissent, réveil en pleine nuit avec des hauts parleurs, manque de soin, aliments périmés, refus des visites familiales. Sept d'entre eux se sont évadés fin novembre. Une grève de la faim s'est organisée. Ils dénoncent leur détention abusive et réclament leur libération.
Au CRA du Mesnil Amelot, les détenus appellent également à l'aide: pas de chauffage, manque de respect de la part des policiers, saleté des lieux.
La plupart des détenus savent que ce qui les attend c'est l'expulsion vers le pays qu'ils ont fui ou vers un pays tiers qui collabore contre finance à la politique inhumaine de notre gouvernement.
Le nombre d'expulsion d'étrangers est présenté comme un "record" dont la France devrait s'enorgueillir. Le gouvernement veut convaincre l'opinion publique que les personnes en situation irrégulière doivent tous être expulsées, qu'elles représentent un danger et sont la cause de tous les problèmes sociaux et économiques du pays.
Mais ce discours populiste ne berne plus grand monde.
Les détenus des CRA ont raison de se rebeller. Ils ne sont ni des délinquants ni des criminels.
Ils ont droit à la liberté !
Informons-nous, soutenons-les !

Une émission de France Culture sur le CRA du Mesnil-Amelot:
http://www.franceculture.com/emission-les-pieds-sur-terre-centre-de-retention-2010-12-07.html

Prochainement à Calais
Premier conseil des policiers
Les conseils des migrants, c’est quoi?
C’était une promesse de campagne de Natacha Bouchard et après son élection à la municipalité de Calais, un premier conseil des migrants a eu lieu en septembre 2008. 
Le but déclaré de ces réunions est d’améliorer le quotidien des migrants, en collaboration avec les associations humanitaires qui s’évertuent depuis la fermeture du camp de Sangatte à fournir le minimum vital aux personnes errant dans Calais.
Jamais aucun migrant, depuis 2 ans, n’a été convié à participer à un conseil des migrants.
Quelles avancées suite à ces réunions?
- Le lieu de distribution des repas à été déplacé dans un espace fermé rue de Moscou. Les anciens lieux, le hangar Paul Devot au pied du phare, et le quai de la Moselle derrière la mairie, étant bien trop visibles au gout des autorités. La police peut y intervenir comme des fauves près d'un point d'eau sans se soucier d'être vue de la population.
- Les douches dont les migrants pouvaient bénéficier au compte goutte rue Anatole France sont maintenant à la limite de Calais sur le terrain des gens du voyage.
- Le secours catholique a du plier sous le chantage municipal et abandonner son idée d'accueillir les personnes fragiles au Virval, pour le faire plus loin, vers le lycée agricole aux Attaques.
- Dès l’automne 2008, la municipalité a enchainé les arrêtés municipaux (sans toujours s’occuper des délais et autorisations légales requises) pour fermer les squats des migrants. Le squat de l’ancienne usine Pagnié sera ainsi fermé puis réoccupé plusieurs fois.
La volonté de détruire tout lieu de vie collective est claire. Chaque bâtiment en ruine occupé finit par être racheté par la municipalité. Mais celle-ci n’hésite pas non plus à envoyer ses services municipaux nettoyer des lieux privés après les rafles des CRS ou des policiers de la PAF.
Et il n’est pas rare pour les migrants de devoir récupérer leurs affaires personnelles et les kit de survie des humanitaires à la déchetterie.
Actuellement c'est le squat des soudanais dans l'ancienne usine Thélu qui subit les attaques des autorités. Casse des quelques vitres restantes, gazage régulier des affaires, rafles quotidiennes des habitants. Pourtant ils ne dérangent personne en se mettant à l'abri dans cette friche industrielle...
Le conseil des policiers, ce sera quoi?
Y seront recensés tout abus, tout excès de zèle, toute exaction policière commise en uniforme ou en civil, contre les migrants et les militants qui soutiennent leurs droits, mais aussi contre les jeunes, les SDF, les syndicalistes, les manifestants…
Nous dénoncerons tous les faits des forces de l’ordre qui seront en contradiction avec la Convention de Genève et la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, le droit d’association, de réunion, d’expression et de manifestation.
Y seront invités tout témoin, toute victime, et toute personne prête à s’investir pour protéger nos droits humains et civils contre une certaine forme de totalitarisme.
Plus d’infos au prochain numéro….

Tasmania

En septembre 2009, le conseil d'Etat avait annulé le décret autorisant le taser aux policiers municipaux, considérant que son usage était insuffisamment encadré juridiquement et présentait des dangers pour la santé.
Mais depuis mai 2010, un décret de Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, rétablit le droit aux municipalités de décider d'équiper leurs policiers de taser.
Ceux qui utilisent le thème de la sécurité comme pilier de leurs campagnes électorales, laissent entendre qu'il n'y a pas d'alternatives entre l'arme à feu et la nouvelle arme "non létale".
Et il est clair que face à ce choix, chacun préfèrera voir les policiers armés de taser plutôt que de Sig-Sauer.
Mais c'est oublier que les polices municipales, à leur création, n'étaient pas armées...
Et la prévention dans tout ça?
Quelle société voulons-nous?
Caméras de surveillance, répression et robocops à chaque coins de rues? Police dans les écoles pour palier au manque d'enseignants et de surveillants?
Grilles entourant les quartiers des privilégiés et zones de non-droit où les populations moins solvables sont laissées à l'abandon?
La dérive sécuritaire en France montre bien la décadence de nos sociétés dites civilisées.
Soyons vigilants, surveillons les ordres du jour des conseils municipaux.
Madame Bouchart, si proche du pouvoir actuel, décorée en novembre de l'Ordre du Mérite, pressentie pour devenir sénatrice, pourrait, pour plaire à ses chefs, décider de faire voter l'utilisation du taser à Calais...

Si vous souhaitez nous suivre, recevoir le journal en format PDF, ou simplement réagir à nos articles, vous pouvez nous envoyer un email à sansfrontieres.calais@gmail.com
Une copie du journal est en ligne au blog suivant: http://sansfrontieres-calais.blogpost.com, commentaires bienvenus!

“La seule charité sans teinte est la justice. La charité est atteinte par les symptômes; la justice par les causes.” - Frank Crane

Le Chancre de la Frontière

C'est dimanche. L'après-midi, les familles vont se promener sur le port. On regarde les bateaux partir ou arriver, on se salue, on bavarde, on profite du soleil.
C'était hier. Aujourd'hui, le port est un espace coupé de la ville,
entouré de clôtures et de mécanismes de surveillance impressionnants.
La frontière s'est fermée, coupant le port de la ville.
Mais la frontière n'a pas seulement coupé le port de la ville. La frontière a envahi la ville. Une frontière fermée bloque et refoule.
Bientôt ceux dont le Royaume-Uni n'a pas voulu se retrouvent à errer dans les rues de la ville, à dormir dans les parcs et dans les dunes. Refusés par l'Angleterre, mais indésirables en France. Et bientôt, la violence s'installe. La police quadrille la ville de jour comme de nuit, arrête les personnes, les brutalise souvent, détruit les abris. Une compagnie de CRS est spécialement affectée à cette tâche, en soutien à la police aux frontières, en lien avec la police nationale. Qui dira la trace que laisse dans la tête de chaque Calaisien cette violence quotidienne qu'on peut ne pas voir mais qu'on peut difficilement oublier? Qui sait si la frontière n'est pas venue se nicher dans l'esprit de chacun, orientant jusqu'au regard de ceux qui ne veulent pas voir?
Et puis la frontière se répand, dans tous les ports menant au Royaume-Uni, à Dunkerque, Boulogne, Ouistreham, Cherbourg, Saint Malo, Roscof, en Belgique, à Ostende et Zeebruges. La frontière se répand à l'intérieur des terres, près des aires d'autoroute où l'on peut tenter sa chance de se glisser dans un camion et – peut-être – de franchir ainsi caché la frontière fermée. Saint-Omer, Norrent-Fontes,
Steenvoorde, Angres, Marquise, Roclaincourt. Partout des abris de
fortune, dans les dunes, les bois, les fossés, parfois moins de
précarité quand les associations le peuvent ou quand la mairie le veut
bien. Et partout police, arrestations, violence.
Et la frontière se répand dans les gares, police britannique à l'accès des trains vers le Royaume-Uni, police française dans les gares et les trains vers le littoral.
Frontière des contrôles au faciès – comment arrêter les sans-papiers
sans contrôler, jour après jour, tous ceux qui ont l'air pas français.
Frontière de la solidarité,transformée en délit, la menace pour tenter d'isoler. Isoler les sans-papiers du reste de la population, isoler ceux qui aident de ceux qui ont peur. Isoler et faire taire. Aider en silence, puisque c'est interdit.
Frontière du quotidien. Quand vous dormez dehors, quand vous prenez l'apparence d'un clochard, on vous donne parfois un bout de pain, on
parle bien plus rarement avec vous.
Autant de murs à briser.

 Vendredi 3 décembre, -7°, trois hommes de couleur noire se font contrôler par les CRS, compagnie 3, dans la rue Mollien. Selon les dires des policiers rapportés par le journal, le contrôle d'identité aurait mis en colère l'un des trois hommes qui aurait insulté, agressé l'un des policiers. Comparution immédiate: 8 mois fermes.
Selon les organisations des droits humains, mis à part les skins, les policiers français qui tabassent les gens, se plaignent immédiatement d'outrages et de rébellion pour se couvrir d'une possible plainte de leur victime.
Selon le code pénal, les policiers doivent justifier leur contrôle d'identité sans invoquer la couleur de peau, ni la langue utilisée. Les CRS doivent de plus justifier leur contrôle dans les rues de Calais par un ordre du procureur qui détermine le type de contrôle, la zone et le temps du contrôle.
Samedi 4 décembre, les CRS chassaient les réfugiés à la sortie du local où les réfugiés sont hébergés.
Plus tard, ils arrêtaient à nouveau les gens avant qu'ils n'atteignent le terrain du repas.
Dimanche 5 décembre, au matin, même action pour empêcher les réfugiés d'aller manger, etc.


Calais Migrant Solidarity est un groupe transnational de militants qui apportent un soutien journalier aux migrants en difficulté, à travers de la surveillance policière, des rondes et des veilles autour des squats, jungles et campements, des donations de vêtements, des leçons d'anglais et de français, et d'autres actes de solidarité. Il y a grand besoin de Calaisiens! Prenez contact en envoyant un email à calaisolidarity@gmail.com
Tenez vous au courant en visitant le blog:
http://calaismigrantsolidarity.wordpress.com/fr

Le fichier PDF est disponible à cette adresse: Sans Frontières Décembre 2010

Without Borders is available in PDF format here: Without Borders December 2010

jeudi 11 novembre 2010

Numéro de novembre 2010



Ouvrir les frontières?
Il faudrait fermer les frontières pour éviter d'être envahis par tous ceux qui veulent venir vivre en Europe. Regardons cette question de plus près.

Ça bouge peu, mais dans tous les sens

Il y a 200 millions de migrants dans le monde (chiffres de 2005), soit moins de 3% de la population mondiale. Parmi eux, 62 millions sont venus de pays du Sud dans les pays du Nord, 61 millions ont quitté un pays du Sud pour un autre pays du Sud, 53 millions un pays du Nord pour un autre pays du Nord, 14 millions un pays du Nord pour un pays du Sud. Donc les migrations se font dans tous les sens, et les mouvements du Sud vers le Nord ne représentent qu'un petit tiers de l'ensemble. On est loin d'une invasion.
À titre de comparaison, entre les années 1880 et les années 1960, environ 60 millions d'Européens sont allés vivre sur un autre continent. Les migrations évoluent, et l'Europe a été une terre d'émigration encore tout récemment.

Des hordes de plombiers polonais
L'Union européenne est devenue un espace de libre circulation et de libre installation pour les citoyens européens. Une invasion avait été prédite, de l'Europe de l'Ouest par les habitants de l'Europe de l'Est plus pauvre.
Et l'invasion n'a pas eu lieu. Les déplacements de population ont été faibles. Et surtout la migration se fait de manière beaucoup plus souple que lorsque les frontières sont bloquées: aller travailler quelques années dans un autre pays puis revenir, ou repartir vers un troisième pays offrant de meilleures opportunités, s'installer plus durablement ou faire des aller et retours.
On peut imaginer qu'appliquée au niveau mondial, la liberté de circulation et d'installation jouerait de la même manière: pas de mouvements d'une ampleur excessive, et une mobilité beaucoup plus diverse.
La fabrique des sans-papiers
La fermeture des frontières a pour premiers résultats de plus en plus de morts lors du franchissement illégal des frontières, le développement de mafias autour du passage des frontières, et la fabrication de sans-papiers.
Les sans-papiers ne sont du reste le plus souvent pas des personnes qui sont entrées illégalement en Europe. La plupart du temps, il s'agit de personnes qui ont eu un titre de séjour, et qui n'en ont plus, soit que leur situation ait changé, soit que la loi ait changé.
Dans tous les cas, c'est la loi qui fabrique les sans-papiers, et met des travailleurs sans droits à la disposition des employeurs. La liberté d'installation, c'est aussi donner à chacun les mêmes droits et faire disparaître cette forme d'exploitation sans limite.


Un CRA dans la PAF !

Cela fait longtemps qu’il n’y a pas eu de mobilisation contre le centre de rétention de Coquelles. La population continue à faire ses courses tranquillement à la cité Europe sans s’imaginer qu’un CRA, qu’une prison pour étranger, est installée derrière le commissariat de la Police Aux Frontières.
Face à la décision de son agrandissement en 2002, juste avant la fermeture du centre de Sangatte, il y avait eu tentative de mobiliser les coquellois sur le fait qu’on ait changé discrètement un plan d’occupation des sols de leur commune pour le rendre constructible et y installer une prison « humaine »..
Puis des dizaines de mobilisations se sont succédées, relais local de mobilisations internationales, soutien aux Sans Papiers du CSP59 de Lille « délocalisés » en rétention loin de leur groupe de lutte, refus d’expulsions prévues vers des pays en guerre, dénonciation de l’antenne du tribunal de Boulogne installée dans l’enceinte du centre de rétention, ou juste mobilisations pour alerter sur l’existence même d’un tel lieu.
Avec la loi Besson qui vient d’être votée, les juges des Libertés n’auront plus la possibilité de dénoncer les procédures illégales d’arrestations et de rétentions des sans papiers.
La délimitation un peu floue entre le commissariat de la PAF et le centre de rétention où seront enfermés encore plus longtemps les sans papiers va être de plus en plus difficile à cerner pour les incarcérés qui bénéficient rarement de traducteurs pour connaitre leurs droits.
Plus que jamais, mobilisons-nous contre les centres de rétention, contre les expulsions et pour la liberté des circulation et d’installation.


Nique la police

Ce midi, alors que nous discutions, assis par terre, à la distribution, une voiture de police s'est approchée du grillage du côté du port. Sans vraiment y penser, j'ai repris un des slogans anglais, No justice no peace, Fuck the police, sur un ton normal et sans crier. Un des migrants, qui était à côté de nous, m'a corrigé en me disant dans son propre anglais approximatif: “Mais, tout le monde dit 'fuck the police,' mais c'est grâce à la police qu'il y a un minimum de paix. On devrait pas dire ça. Si tu es attaqué, la police elle te protège. Alors dis pas fuck the police.”
Il y a quelques semaines, des fascistes étaient arrêtés par cette même police, après que des migrants Soudanais aient été agressés. Des membres du mouvement No Borders se sont demandés d'où venait cette soudaine clémence. Est-ce que la police est simplement jalouse et souhaite garder un monopole de la violence? Il faudrait soulever ces idées reçues sur la bienveillante police, qui sont aussi partagées par les citoyens.
La police, et l'Etat qui l'engage et l'entraîne, est plus qu'heureuse de mettre en état d'arrestation, et de poursuivre les personnes, en dehors de l'Etat lui-même, qui se seraient livrées à de vrais crimes. Tant que les individus en question ne sont pas de l'Etat lui-même, la police fera de son mieux pour faire honnêtement régner la loi entre chacun, et elle se sentira très imbue d'elle-même pour cette raison.
Mais évidemment, l'Etat qui engage et entraîne la police, ne saurait être questionné par la police elle-même. Le travail de la police consiste précisément à défendre les lois de l'Etat, qui sont aujourd'hui de nature tyrannique. Nous nous retrouvons donc dans une situation étrange, où des personnes qui, théoriquement, nous protègent, sont aussi, et surtout, susceptibles de nous agresser pour faire appliquer le droit.
Plus le droit est tyrannique, plus la violence est le seul ressort que l'Etat peut utiliser pour le faire appliquer; nous tenons tous naturellement à notre propre liberté, et personne ne se laisse maîtrisé facilement. La résistance aux contrôles est naturelle; et la violence suit pour soumettre les récalcitrants.
Si nous sommes protégés par des personnes violentes qui n'ont aucun égard pour nos libertés, alors nous devons prendre en main notre protection; que nous puissions leur dire d'aller se faire foutre, que nous nous débrouillerons sans eux si la liberté est réellement le prix que l'Etat exige pour notre sécurité.


FRONTEX, au service de la technocratie xénophobe

Peu de personnes encore connaissent l'existence de FRONTEX, agence européenne de protection des frontières extérieures. Véritable armée tentaculaire et sous-terrainne,son budget pour empêcher les non-autorisés d'arriver et de rester en Europe ne cesse d'augmenter. Pas facile à Calais d'obtenir une salle pour organiser une réunion d'information au sujet de FRONTEX...
Prévue en juin 2009 au Channel, pendant le camp No Border, la réunion sera annulée sous pressions politiques.
Si vous avez raté la mâtinée d'info-débat du 6 novembre 2010 à l'Alhambra, voici  quelques sites pour vous informer:
http://numerolambda.wordpress.com/2010/09/01/frontex-airlines-la-compagnie-high-cost-qui-ne-vend-que-des-allers-simples/
http://frontexplode.eu/
http://interstice.over-blog.org/article-frontex-un-outil-au-service-de-la-technocratie-xenophobe-48619215.html

Personne n'est illégal

“Nous avons tous une forte disposition à regarder ce qui est légal comme légitime, à ce point qu'il y en a beaucoup qui font découler faussement toute justice de la Loi.” Frédéric Bastiat

A la suite du scandale des expulsions de Roms, des membres du gouvernement se sont défendus de tout mal en déclarant qu'ils ne faisaient qu'appliquer le droit. La citation ci-dessus expose l'erreur de ce raisonnement: même la Loi peut être injuste. Après tout, la Loi en France n'est peu de plus que ce qu'ont écrit et voté quelques centaines d'hommes politiques. Tout élus qu'ils sont, ils restent des êtres humains, faillibles, comme tout un chacun.
Il vaudrait donc mieux, pour garder la tête froide, en terminer avec cette manie de s'en référer au Droit avec un grand D, ou de parler de l'état de 'droit,' comme si ces choses tombaient du ciel, la perfection même. Les lois françaises sont imparfaites, et certaines sont injustes. Quelles sont les lois justes et injustes, il nous faudrait un livre pour dire tout ce qu'il y a à dire là-dessus.
Mais pour ce qui est des frontières, nous pouvons simplement dire, qu'il est un droit de l'homme de pouvoir bouger sans entrave, et que les lignes imaginaires que sont les frontières nationales, n'ont aucune existence ou base légale.
Regarder l'histoire de cette institution des frontières révèle qu'elles sont le résultat des guerres que se livrent des Etats, chacun convaincu que l'autre lui fera la peau, pillera ses ressources, ou tyrannisera son peuple. Aujourd'hui, par exemple, maintenant que la paix règne entre la France et l'Allemagne, nous savons qu'il n'y avait pas une réelle animosité éternelle entre nos peuples, qui ne pouvait se résoudre que par de périodiques et immondes bains de sang.
La force ne pouvant pas dans la théorie créer les droits - ce serait vivre dans une société de barbares -, nous devons en conclure que les frontières nationales ne peuvent pas légalement présenter d'entraves au libre mouvement des individus; puisque le territoire qu'elles délimitent n'est pas la propriété de tout un peuple (quoi qu'en disent les Lepénistes), mais la juridiction d'un Etat, dont les prérogatives sont nécessairement limitées par les droits fondamentaux.
Or, aujourd'hui, les Etats français et britanniques présentent l'entrave des passeports et des visas, et autres formalités bureaucratiques, au libre mouvement des individus, sous prétexte de contrôle des frontières. L'illégal est rendu légal; le légal est rendu criminel. Nous marchons sur la tête. La force fait la loi, et la société devient barbare.
No Borders est un mouvement pacifique de personnes qui reconnaissent les droits fondamentaux sans lesquels aucune société ne peut survivre longtemps.

“ Sur les os blanchis de nombreuses civilisations sont écrits ces mots dérisoires: 'Trop tard.' ” - Martin Luther King


L'étrange manie de Madame Bouchart

Il y a un mois, à l'occasion de l'anniversaire de la destruction de la jungle, nous avons été approchés et contactés par plusieurs journalistes, qui voulaient avoir notre point de vue, sur ce qui a changé depuis l'an dernier. Des lieux inhabités qui servaient de refuge aux migrants ont été méthodiquement détruits les uns après les autres, et lorsqu'ils ne pouvaient pas l'être, comme pour le dessous des ponts, la police a simplement été envoyée pour en retirer les tentes. Dans une de ces attaques l'an dernier, elle a également prétendu remettre celles-ci aux associations, ce qui s'est trouvé être complètement faux.
Le raisonnement selon lequel on ne peut pas laisser les gens dormir quelque part est, que ces personnes n'ont pas le droit d'être en France. Comme nous l'avons expliqué ailleurs, la France elle-même n'est pas une propriété collective -même si Marine LePen voudrait changer cela, avec les résultats immondes que l'on connaît de l'expérience des années 30 et 40- et donc il est difficile de voir qui pourrait interdire de territoire qui que ce soit; c'est-à-dire, interdire à quelqu'un de se trouver dans les limites d'une partie de la Terre qui englobe quand même 600 000 km² ! Est-ce que l'on peut imaginer quelque chose de plus arrogant? Et pourquoi pas leur interdire le ciel et les océans pendant qu'on y est?
Puisque les migrants sont en France dans leur droit, contrairement au gouvernement qui veut les en interdire, ils ont aussi le droit de trouver refuge là où ils peuvent, dans la mesure où cela ne gêne personne. Et c'est précisément la situation des Soudanais et autres Africains qui logent dans des bâtiments abandonnés, sur la rue Descartes.
(suite page 4)
Ce que certains appellent Africa House, sert de refuge à des personnes qui sont sans abris, et c'est contre tout sens commun que Madame Bouchart a décidé d'en expulser les habitants, et de détruire ces bâtiments autrement déserts.
Les ouvriers de la ville se rendent chaque jour à Africa House pour commencer le nettoyage des lieux, depuis le 4 octobre, et pour préparer la destruction insensée qui mettra à la rue des personnes qui n'ont aucun autre abri à disposition. La folie de Madame Bouchart est légèrement atténuée par le comportement respectueux des ouvriers, qui préviennent et décrivent les bâtiments qui seront nettoyés, sans chercher à occasionner de gêne pour les migrants, sans tenter de détruire ou de leur enlever leurs affaires, comme cela arrive parfois.
Les descentes de police, elles aussi injustifiées et sans aucun sens, autrement que pour leur faire mener une salle vie et encourager le retour, continuent. Et la veille des No Borders avec. C'est ainsi que nous attendons chaque jour avec angoisse l'arrivée de ces personnes surarmées, et que nous tentons de prévenir les habitants de Africa House, que la police arrive, pour enlever et détenir, et pour peut-être tenter de déporter. Avec l'accord d'autorités que l'on nommerait autrement tyranniques, mais avec lesquelles, à l'occasion de l'épuration ethnique qu'est la politique migratoire actuelle, nous acceptons de coopérer. Certains diraient, collaborer.

“Quand y'en a un, ça va. C'est quand y'en a plusieurs que ça pose problème.” - Brice Hortefeux


Port de Calais : centre franco anglais de policiers avant « guantanamo »?

Prêt à vendre le dernier pavillon français SEAFRANCE, le port de Calais est envahi maintenant de policiers ANGLAIS dont la zone de contrôle s'est étendue.
Le 23 mars 2010, Besson et Woolas, ministres de l’immigration, inauguraient un nouveau centre de coordination policière sur le port de Calais.
Le nouveau centre de coordination opérationnel conjoint (CCOC, en français, JOCC en anglais) était ouvert depuis le début février. Woolas se targuait que de grandes opérations conjointes aient été réussies avant l’inauguration du 23 mars 2010.
On était impatient de lire ce qu’il allait annoncer : deux femmes arrêtées et 46kg de tabac saisis. Bravo ! On imagine aisément que ce dispositif coordonné n’ait pas été monté par nos activistes de l’Ultra droite pour stopper de telles irrégularités.

Concentration de policiers

Les PAF anglaise et française, la douane et le service de sécurité de la chambre de commerce, tout le monde va participer au massacre du droit d’asile des réfugiés, mais cette fois, on collabore. On ne fait pas dans son petit coin tout seul. Car tout doit être en ordre avant l’étape suivante…

Policiers ou activistes d'extrême-droite?

Les français seront chargés d'interroger les camionneurs sur leurs lieux de repos et transformer les réfugiés en passeurs.
Les anglais étant chargés quant à eux de stopper au passage ceux qui auraient été repérés par les français comme passeurs. (avec la police française, il est très facile de devenir passeur, surtout quand on est étranger. Demandez à la PAF.)
Rappelons que:
- L'Angleterre refuse l'espace Schenghen. Nous n'avons donc pas à surveiller sa frontière qui est une frontière extérieure.
- Les hommes, femmes et enfants survivant dans nos rues sont des réfugiés. Ils ont le droit de demander l'asile dans les pays signataires de la convention: la France et la Grande Bretagne ont signé.

Que font donc des policiers étrangers dans notre ville?


Calais Migrant Solidarity est un groupe de personnes qui apportent un soutien journalier aux migrants en difficulté, à travers des rondes autour des squats, jungles et campements, des donations de vêtements, des leçons d'anglais, et d'autres actes de solidarité. Il y a toujours besoin de volontaires! Prenez contact en envoyant un email à calaisolidarity@gmail.com
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